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Or Série - Natation artistique
Photo: Liz Corman
Montréal, 9 juillet 2021 (Sportcom) – Comme bien des gens, Audrey Joly s’est réinventée au cours des derniers mois. La nageuse artistique a littéralement plongé jusqu’aux Jeux olympiques de Tokyo en pratiquant un deuxième sport pour parfaire son art et offrir une performance grandiose au pays du Soleil levant cet été.
Tous les jeudis, en matinée, Audrey Joly se rendait avec enthousiasme à son entraînement de plongeon, accompagnée de quelques coéquipières. D’abord cinq à participer à ces séances, Kiara Quieti, Sydney Carroll et elle ont finalement été les seules à changer de discipline à raison d’une journée par semaine.
« J’étais toujours excitée de me rendre à mon cours de plongeon, parce que je savais que ça allait augmenter mes connaissances en poussée acrobatique », raconte Joly à Sportcom, elle qui est responsable des banquines depuis son arrivée avec l’équipe nationale, en 2017. Les banquines étant les sauts où l’athlète est propulsée dans les airs et sort complètement de l’eau.
« Le plongeon a toujours été quelque chose que j’aurais voulu essayer à mon jeune âge. J’étais super contente de pouvoir essayer avec un entraîneur expérimenté. »
Cet entraîneur d’expérience, c’est Devon Butters, membre du personnel de l’équipe nationale junior de plongeon. Après avoir dirigé le club l’Envol durant six ans, Butters a rejoint la fédération canadienne au début de 2020 et a accepté de donner un coup de pouce aux nageuses artistiques, l’hiver dernier.
« J’avais déjà aidé un club à l’occasion, mais c’était une première avec l’équipe nationale. On nous a demandé si quelqu’un était disponible une ou deux heures par semaine et ça fonctionnait avec mon horaire », explique Devon Butters. Sans se proclamer expert, ce dernier détenait néanmoins quelques connaissances en natation artistique, puisque sa sœur Meaghan et son amie Laura Swift ont déjà pratiqué et entraîné ce sport par le passé, ce qui l’a grandement aidé dans le processus.
« C’était le fun de voir des athlètes qui avaient zéro expérience en plongeon, mais qui démontraient tout de même de très bonnes habiletés physiques. Ce sont clairement des athlètes, capables de faire plusieurs choses dans leur sport. […] Elles sont toujours très motivées et veulent apprendre, veulent être meilleures », remarque-t-il.
Nul besoin de souligner que le changement d’air a été apprécié par les athlètes en temps de pandémie. Sans compétition, le plongeon est vite devenu une source de motivation pour rester accrochées et continuer à s’améliorer.
« C’est toujours motivant de faire de nouvelles affaires, d’avoir un autre type d’entraînement et de recevoir de nouvelles corrections », confirme Audrey Joly.
À la vitesse grand V
Devon Butters admet qu’il n’avait pas réellement d’attentes à l’aube des premiers enseignements avec ses nouvelles protégées. Il souhaitait simplement maximiser le temps octroyé et a finalement été agréablement surpris du chemin parcouru.
« D’habitude, quand tu commences le plongeon, t’as six ans. […] Comment faire une position groupée ou une ouverture arrière; t’apprends ça dans les premières semaines de plongeon, mais tu n’expliques pas comment ça fonctionne aux enfants. Ça ne les intéresse pas, ils veulent juste plonger ! Cette fois, j’avais des athlètes adultes dès le début et c’était super intéressant. Avoir la discussion de comment ça marche, ça m’a aidé comme entraîneur. »
D’une durée de 1h30, les entraînements de plongeon ont, au départ, essentiellement été effectués sur des trampolines et dans les harnais. Des sessions qui permettent aux débutantes d’effectuer beaucoup plus de répétitions sans avoir à sortir de la piscine et à remonter sur le tremplin après chaque saut. Au fil du temps, leur progression leur a permis de passer plus de temps à l’eau.
« Au début, je n’avais aucune idée de ce que je faisais, se rappelle l’athlète de Saint-Eustache. Je n’avais aucune base en plongeon et je ne savais pas comment m’y prendre. Je le faisais comme je le voyais, mais je n’avais aucune technique. On ne m’avait jamais appris à plonger et ça avait toujours été des essais et erreurs. »
Les conseils de Devon Butters lui ont permis de se familiariser avec les bases de cette discipline et de les incorporer graduellement dans ses routines en natation artistique, tout comme ceux de son entraîneur acrobatique, Mickael Begon. Butters a également enseigné aux nageuses comment se corriger elles-mêmes, puisqu’il n’allait pas pouvoir les accompagner aux compétitions.
Des effets sur toute l’équipe
La persévérance et la rigueur d’Audrey Joly ont fait en sorte qu’elle puisse atteindre un tout autre niveau en vue des Jeux olympiques de Tokyo, tirant ainsi l’ensemble de ses coéquipières vers le haut.
« On a tout de suite vu une amélioration, non seulement dans son entrée à l’eau, mais dans sa ligne et dans sa perception dans l’espace où est son corps. Elle a agrandi sa boîte d’outils en tant qu’athlète », analyse l’entraîneure adjointe de l’équipe nationale de natation artistique, Kasia Kulesza.
Kulesza mentionne également des progrès fulgurants en ce qui a trait à la confiance de la jeune nageuse de 23 ans. Le rôle de voltigeuse vient avec son lot de pression, alors que la réussite des banquines est primordiale dans la réalisation des routines.
« Elle réussit (ses sauts) plus souvent, son taux de réussite a augmenté drastiquement et certains sauts sont tellement stables que ça devient une source de confiance pour elle. Il semble y avoir eu un déclic à ce niveau-là. »
Membre de l’équipe nationale, Andrée-Anne Côté abonde dans le même sens.
« Ç’a été extrêmement bénéfique. Tout le travail qui a été fait en plongeon ainsi qu’avec Mickael (Begon) a été à l’origine d’une belle collaboration. Audrey était toujours prête à essayer des sauts plus difficiles avec de belles entrées à l’eau, ce qu’on ne faisait pas toujours avant. »
Un monde de possibilités
Si une telle évolution a pu être possible après seulement quelques mois de plongeon, à quoi peut-on s’attendre d’un plan d’entraînement élaboré sur la totalité d’un cycle olympique ?
« J’ai fait du plongeon, mais seulement pendant quelques mois. Après plusieurs années, je développerais beaucoup plus de techniques. Je suis encore en train d’apprendre et je vois déjà une énorme différence », affirme Audrey Joly avec conviction.
La collaboration a également plu à Devon Butters, qui souhaite répéter l’expérience si l’occasion se présente.
« J’étais content d’apprendre qu’il y avait des résultats clairs perçus dans leur routine. Le travail qu’on a fait a démontré que ça vaut la peine de le faire. Moi, j’ai beaucoup aimé ça et si j’ai le temps, c’est quelque chose que j’aimerais continuer », insiste-t-il.
De telles initiatives pourraient bien avoir un impact significatif sur l’ensemble du sport à l’international. Selon Kasia Kulesza, le Canada figure parmi les meilleurs pays en matière de sauts acrobatiques et c’est pour cette raison qu’il peut se permettre d’en insérer un bon nombre dans ses routines. Un aspect avant-gardiste qui pourrait porter fruit au cours des prochaines années.
« Les meilleures au monde poussent dans cette direction. Tu ne peux pas faire ces sauts sans avoir la base pour pousser assez haut. La voltigeuse doit atteindre une certaine hauteur pour réussir. C’est là que notre sport s’en va, avec de plus en plus de sauts. »
Pour le moment, les juges notent les performances selon leur appréciation générale, mais le système ne possède aucune valeur prédéterminée, chose qui risque de changer éventuellement. Des figures pourraient rapporter un certain nombre de points selon son coefficient de difficulté, à l’image du plongeon.
« On pousse pour s’en aller vers ça. On essaye d’innover dans notre sport et d’avoir une certaine reconnaissance internationale du fait qu’on effectue des sauts qui comportent une certaine difficulté. On a fait des pas de géant dans les dernières années, mais on pourrait aller encore plus loin », conclut l’entraîneure adjointe.
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