De petites erreurs excluent Laurence St-Germain du top-10
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Bernard Brault
Montréal, 15 mai 2024 (Sportcom) – Bernard Brault est la référence en photographie sportive au Canada. La preuve : deux jours après que Sportcom soit allée à sa rencontre pour qu’il partage sa passion, le Longueuillois a pris le chemin de Rideau Hall pour recevoir le titre de Membre de l’Ordre du Canada.
Dans son bureau de travail, il est difficile de voir la couleur des murs tant ils sont tapissés de diplômes honorifiques et de prix remportés en concours. Quelques photos sportives marquantes de sa carrière de près de 50 ans ornent les murs, mais aussi du monde politique et artistique, comme en témoignent les portraits de René Lévesque et Yoko Ono. Et c’est sans parler de ses archives qui contiennent tous ses négatifs, diapositives, et plus de 165 scrapbooks de ses publications imprimées dans différents journaux, rangés dans une autre pièce.
Un dossard de photographe est sur le dossier de son fauteuil de bureau est c’est avec une tasse de café qui a les allures d’une lentille de caméra qu’il a pris le temps de répondre à nos questions.
C’est son ami, l’ancien bosseur et champion olympique de 1994 Jean-Luc Brassard, qui résume probablement le mieux le travail du photographe : « Que l’on soit au mont Sutton ou aux Jeux olympiques, il n’y a pas de différence. Son intention de faire de belles photos est absolument la même. »
« C’est tellement bien dit », avance le principal intéressé quand on lui cite la remarque du Boss des bosses, même s’il concède qu’il y a plus de pression aux Jeux olympiques que dans la station de ski estrienne.
Bernard Brault a couvert 13 Jeux olympiques pour La Presse en plus d’avoir suivi les circuits de sports professionnels à Montréal. Il sera de retour à Paris l’été prochain à titre de photographe pigiste pour le Comité olympique canadien.
Préparation + chance = photo iconique
Il y a quelques mois, le photographe a commenté dans son compte Instagram que ses deux photos sportives iconiques étaient celle du saut kozak de Jean-Luc Brassard réalisé dans sa descente olympique victorieuse en 1994, ainsi que celle de Patrick Roy, les bras dans les airs, à son dernier match avec les Canadiens de Montréal, dans un triste souvenir d’une défaite cinglante subie contre les Red Wings de Détroit.
La photo de Brassard à Lillehammer a failli ne jamais être prise. Le thermomètre indiquait -20 degrés et a gelé l’appareil du photographe. Impossible de prendre les photos en mode rafale.
« Il m’avait dit qu’il ferait ce saut à celui du bas. Je commence (à photographier) et je vois que ça ne marche pas. J’ai donné un coup sur le boitier et juste au moment où il fait son kozak, j’ai réussi à le capter. Ensuite j’ai eu sa réaction au bas de la piste. […] À cette époque-là, en focus manuel et avec un film de 36 poses, il fallait vraiment que tu sois dessus ! »
Le reste appartient à l’histoire.
Comme le mentionne le photographe, il avait préalablement discuté avec le bosseur pour savoir ce qu’il comptait faire dans sa descente afin de trouver un emplacement optimal pour mitrailler l’action à plus de 10 images par seconde. La connaissance des sports est aussi un élément indispensable lorsque vient le temps de faire du repérage.
Aux Jeux olympiques, ce manège se répète pendant une quinzaine de jours consécutifs, par temps froid ou sous une chaleur accablante, selon la saison, le tout en transportant des kilos d’équipement dans des autobus bondés d’un site de compétition à l’autre.
« Les Olympiques, il faut que tu arrives en forme. Je peux dire que je perds quelques kilos quand ils sont terminés parce que ce n’est pas un horaire régulier. Tu manges quand tu peux. »
Le photographe est un témoin privilégié de l’action, mais paradoxalement, il en est aussi isolé.
« Il faut que tu rentres dans ta bulle et il faut que tu captes l’émotion. Je ne dis pas que je n’ai pas d’émotions. C’est arrivé à des funérailles ou, je me souviens très bien, à la dernière descente de Jean-Luc Brassard aux Jeux olympiques de Salt Lake City (2002), quand il serrait sa sœur dans ses bras. C’était très émotif pour moi et je sentais la fin d’une carrière pour lui. C’est l’athlète que j’ai photographié le plus souvent. J’étais là à sa première Coupe du monde au mont Gabriel en 1991, aux Jeux de Lillehammer, Nagano et Salt Lake City. »
Bernard Brault conserve d’ailleurs un rapport spécial avec le monde du ski acrobatique, un sport qu’il a commencé à photographier à la fin des années 1970.
« Les athlètes du ski acrobatique sont des gens simples, pas compliqués et jamais hautains. C’est vraiment le sport que j’ai préféré couvrir. Les athlètes sont beaucoup plus accessibles qu’en Formule 1, par exemple. »
C’est d’ailleurs lui qui a pris le cliché que le bosseur Mikaël Kingsbury a mis en ligne, il y a une dizaine de jours, pour annoncer que sa conjointe et lui attendaient l’arrivée de leur premier enfant.
La révolution numérique
Des années 1970 aux années 2020, le métier de photographe a subi un choc technologique marqué par l’arrivée de la photo numérique. Bernard Brault a commencé à quitter la photo argentique pour le numérique aux Jeux olympiques de Nagano, en 1998. Cela lui a permis d’envoyer plus rapidement ses images au bureau de La Presse au lieu de revenir au centre de presse pour y faire développer ses films… et de possiblement rater l’heure de tombée en raison du décalage horaire.
Ce changement technologique, il y est plongé avec enthousiasme. Même chose avec les drones pour photographier du haut des airs, outils qu’il maîtrise depuis maintenant quatre ans.
« Ça ne m’a pas fait peur et je n’ai jamais regardé en arrière. Je n’ai presque pas fait de film depuis le début des années 2000. Je ne veux pas revenir en arrière et je me contente du numérique. Ça progresse, les appareils sont tellement performants ! »
Aujourd’hui, les photos prises dans une finale olympique se retrouvent dans les banques d’images des grandes agences internationales en moins de 5 minutes. Cette accélération du processus a aussi rendu la durée de vie d’une photo plus éphémère. Instagram a donné un nouveau souffle à la photo, mais la vidéo a repris le dessus l’arrivée des Reels.
« Les gens regardent le compte Instagram et je ne sais même pas s’ils regardent toutes les photos. Il faut vraiment que la première soit punchée. […] Les bonnes photos restent quand même et les gens les apprécient. Tu as beau regarder des vidéos, tu ne t’en souviens peut-être pas, mais une photo, elle va marquer ton imaginaire. »
Capter l’émotion et l’instant. Ce tout petit moment, saisi à travers son œil, alimente sa flamme qui continue de bruler, même après toutes ces années.
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