12 Mai - 2020 | par Mathieu Dauphinais

Hockey

Cinq moments marquants du hockey féminin au Québec

Nouvelle

Montréal, 12 mai 2020 (Sportcom) – Au Québec, le hockey féminin rime souvent avec des médailles d’or olympiques, des joueuses qui inspirent des générations et une grande rivalité entre le Canada et les États-Unis. Plus de 30 ans après la tenue du premier Championnat du monde, retour sur la jeune histoire d’un sport qui a fait vivre de grandes émotions aux amateurs québécois.

Pour l’occasion, Sportcom s’est entretenu avec Danièle Sauvageau, entraîneure-chef de la formation médaillée d’or aux Jeux olympiques de 2002, Kim St-Pierre, gardienne de but trois fois championne aux JO, et Marie-Philip Poulin, auteure de deux buts gagnants en finale olympique.

Un premier Championnat du monde

Huit formations étaient réunies à Ottawa, du 19 au 25 mars 1990. Les Canadiennes, qui jouaient en rose et blanc, avaient complètement dominé leur groupe en phase préliminaire. La formation avait marqué 50 buts lors de ses trois premiers matchs. Seules les Suédoises avaient compté contre elles… dans une défaite de 15 à 1.

En demi-finale, les Canadiennes avaient eu raison de la Finlande 6-5 avant de battre les Américaines en finale, 5-2. C’était le premier de huit titres de championnes de monde consécutifs.

De véritables pionnières qui évoluaient dans des ligues civiles faisaient partie de cette équipe. « Des joueuses comme Danielle Goyette ou France St-Louis, elles ont grandi avec le hockey féminin et pendant des années, leur inspiration, c’était la passion pure », souligne Danièle Sauvageau.

Ce tournoi avait amené une importante visibilité pour l’équipe canadienne. L’annonce de l’admission du hockey féminin aux Jeux olympiques de 1998 a aussi inspiré la génération suivante.

Une Québécoise dans la Ligue nationale

Le 23 septembre 1992, Manon Rhéaume a gardé le but du Lightning de Tampa Bay contre les Blues de Saint Louis dans un match du calendrier présaison. Cet événement a été marquant pour plusieurs, dont Kim St-Pierre, qui a joué avec les garçons de l’âge de 8 à 18 ans dans la région de Châteauguay.

« Je me souviens que ma mère m’avait acheté son livre. De voir une femme réussir à se rendre jusqu’à la Ligue nationale, c’était vraiment impressionnant pour moi. Mes modèles étaient Patrick Roy et Martin Brodeur. Dans ma tête, j’étais comme la seule fille qui jouait au hockey et ça m’avait vraiment ouvert les yeux. C’est sûr que ça m’a fait rêver », affirme-t-elle.

Une première en 50 ans

Les débuts du hockey féminin aux Jeux olympiques de Nagano en 1998 ont été une étape importante dans la progression du sport au pays, mais le point tournant s’est véritablement produit quatre ans plus tard, aux Jeux de Salt Lake City. Cette première médaille d’or olympique gagnée par le Canada en hockey en 50 ans a tout changé.

Le Canada avait obtenu l’argent au Japon, mais en 2002, en sol américain, la visibilité du tournoi était beaucoup plus grande à travers le Canada, rappelle Danièle Sauvageau.

Kim St-Pierre, qui allait devenir la gardienne de but de cette formation médaillée d’or, se souvient bien d’avoir suivi les Jeux de Nagano. Alors âgée de 19 ans, elle s’est mise à rêver de représenter le Canada aux Jeux. Dès son arrivée avec le programme national l’automne suivant, elle a été sélectionnée au sein de l’équipe.

Lors des premiers tours de glace, elle admet qu’il était impressionnant de patiner aux côtés de pionnières telles que Danielle Goyette, France St-Louis et Nancy Drolet. « Toutes les Québécoises ont tellement été d’un bon support pour nous, les plus jeunes qui arrivions dans le programme », se souvient-elle.

La suite fait partie de l’histoire. L’équipe dirigée par Danièle Sauvageau a vaincu les États-Unis par la marque de 3-2 en grande finale et a laissé une marque importante dans l’histoire de l’Olympisme canadien. Elle a aussi inspiré plusieurs joueuses de l’équipe actuelle telles Marie-Philip Poulin et Mélodie Daoust, joueuse par excellence du tournoi olympique de Pyeongchang en 2018.

« Kim St-Pierre avait joué un match de l’enfer », se souvient Poulin, qui avait regardé le match de son salon avec sa mère. « De les avoir vues gagner à ce moment-là, c’est vraiment quelque chose qui m’a éclairée et qui a mis une étoile dans mes yeux. »

Ses parents lui avaient ensuite donné une affiche de Danièle Sauvageau qui est restée longtemps accrochée dans sa chambre. Cela lui a toujours rappelé de rêver grand et que tout est possible.

« Aujourd’hui, c’est le fun de voir que les petites filles ont déjà des modèles olympiques comparativement aux modèles masculins de la Ligue nationale. On voit que la progression du hockey féminin a été remarquable », ajoute Kim St-Pierre.

Les buts en or de Marie-Philip Poulin

À 18 ans, Marie-Philip Poulin a fait une entrée fracassante sur la plus grande scène, aux Jeux olympiques de Vancouver en 2010. La plus jeune joueuse de la formation canadienne a notamment marqué les deux buts en finale dans une victoire de 2-0 contre les Américaines.

« Je n’aurais pas pu demander mieux pour commencer ma carrière olympique. Mais au moment où tu mets ce chandail, tu réalises que toutes les pionnières qui sont passées là avant toi ont vraiment créé ce chemin pour nous toutes aujourd’hui, souligne-t-elle. Ça n’a pas toujours été facile et ce ne l’est pas encore aujourd’hui, mais ce sont vraiment elles qui nous ont permis de rêver tout au long de ces années. »

À nouveau quatre ans plus tard, à Sotchi, elle a joué un rôle déterminant dans la victoire qui a permis au Canada de gagner l’or une quatrième fois consécutive.

« Marie-Philip Poulin est un grand nom qui a donné un autre boom au programme, explique Danièle Sauvageau. Le but gagnant en 2010 n’a pas été aussi dramatique, mais ce qui fait que son exploit de 2014 est encore plus grand, c’est que c’est un deuxième but gagnant. »

Alors que le Canada tirait de l’arrière 2-0 en troisième période avec quatre minutes à jouer, Brianne Jenner a réduit l’écart, puis la formation a conclu sa remontée grâce à un but de Poulin avec 55 secondes à faire en troisième période. Elle a ensuite marqué le but gagnant en prolongation, donnant ainsi à sa carrière une aura exceptionnelle.

« C’était comme un conte de fées ce match-là. C’est dur à décrire encore aujourd’hui. De revenir de l’arrière, c’est incroyable. Je ne pouvais pas croire d’être au bon moment à la bonne place. Après 2010, je ne m’attendais pas à ce qui allait arriver en 2014 », affirme-t-elle.

Changement dans le circuit universitaire

À partir de 2002, les universités américaines ont recruté davantage les joueuses canadiennes, une conséquence importante du titre olympique qui a un écho jusqu’à nos jours, selon Danièle Sauvageau. Cette dernière juge que plusieurs des meilleures joueuses canadiennes ont contribué à l’essor de l’équipe américaine, championne olympique en titre, en allant jouer au sud de la frontière.

Quelques années après la conquête de la médaille d’or, ce qu’elle a développé sur la scène nationale, elle l’a appliqué dans un programme universitaire. L’arrivée des Carabins de l’Université de Montréal en en 2009-10, seule formation francophone au Québec, a bousculé l’ordre établi. Dès sa première saison, la jeune équipe s’est qualifiée pour le Championnat canadien et a pris la cinquième position. Depuis, les Carabins ont remporté deux titres nationaux.

« Je pense que les gens ont commencé à se demander ce qu’on faisait de différent, se rappelle la directrice générale de ce programme de l’UdeM. Une des conclusions a été de garder nos joueuses. Aujourd’hui, de plus en plus de joueuses demeurent et certaines reviennent des circuits américains. »

Les joueuses n’oublient pas celles qui les ont inspirées. Dans le cadre de camps de formation, Marie-Philip Poulin rencontre souvent les jeunes qui pourraient un jour faire partie de l’équipe nationale.

« Ce qui me réveille tous les matins, c’est de savoir que j’ai peut-être une petite place dans leur tête. Être un modèle pour elles, ça me tient beaucoup à cœur. Je ne pensais pas être dans ces souliers-là un jour quand je pense à toutes celles qui sont passées avant moi et qui m’ont vraiment tout montré », conclut-elle.

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