Béatrice Lamarche et Laurent Dubreuil médaillés au sprint par équipe
Montréal, 15 novembre 2024 (Sportcom) – Béatrice Lamarche et ses coéquipières Carolina Hiller et Ivanie Blondin ont été les plus rapides au…
Montréal, 18 janvier 2021 (Sportcom) – Peu importe le sport, les sprinteurs forment souvent une catégorie d’athlètes à part. Pour faire un effort explosif de quelques instants où les classements se jouent aux centièmes de seconde, il faut une confiance en soi inébranlable. Le patineur de vitesse longue piste Laurent Dubreuil est de cette trempe.
C’est avec le titre de champion du monde au 500 mètres et huit podiums en huit courses de Coupe du monde sur cette distance cet automne qu’il arrivera à Pékin comme un des prétendants à la médaille d’or au 500 mètres et à un podium au 1000 mètres.
Confiant, pas arrogant
Interviewer Laurent Dubreuil est du bonbon pour un journaliste sportif. Ses réponses sont franches, tant après des victoires qu’après des contre-performances. Ses connaissances encyclopédiques à propos de son sport font de lui un véritable « Wikipédia » sur longues lames, tout comme sa passion contagieuse, son rôle de papa et de fan des Patriots de Nouvelle-Angleterre. Un athlète qui détonne dans le sport de haut niveau au pays.
« Mon but n’a jamais été de faire les Jeux olympiques ou de faire les Coupes du monde. Ç’a toujours été de gagner. »
L’anneau couvert attendu à Québec depuis des décennies se transforme aujourd’hui en champ des possibles pour la nouvelle génération. Lorsqu’il patinait sur la glace du terrain adjacent, dans le froid et le vent, celui qui a les deux patins bien ancrés dans son sport depuis sa naissance ne s’en imposait déjà pas de limites.
Ses parents, Ariane Loignon et Robert Dubreuil, sont tous deux Olympiens dans cette discipline, tandis que son frère Daniel et sa sœur Anna-Belle ont fait partie de l’élite canadienne et québécoise pendant quelques années.
Sa confiance en lui, elle est donc innée comme il l’explique.
« Certaines personnes pouvaient peut-être penser que ma confiance c’était de l’arrogance, mais en fait, je ne pense pas que ç’a été de l’arrogance, honnêtement. Je suis quelqu’un d’extrêmement direct et extrêmement franc dans ma vie de tous les jours. Juste au quotidien, mon épouse cuisine un souper et elle me demande si c’est bon, je vais lui dire si c’est bon. Mais si ce n’est pas bon, je vais lui dire. De toute façon, quand elle me pose la question, elle veut le savoir pour vrai. Si ce n’est pas bon, elle va la changer sa recette. Elle me connaît et elle sait que je suis comme ça. »
Le ton est donné. Le patineur mentionne que c’est de cette façon qu’il a été éduqué, notamment par sa mère, qui a été son entraîneure lorsqu’il était plus jeune.
« J’ai été élevé de façon directe : on dit ce qu’on pense et c’est comme ça qu’on fonctionne. C’est resté. Si je dis que je suis dans les meilleurs au monde, ce n’est pas un excès de confiance. Je suis dans les meilleurs au monde. Quand j’étais 15e au monde, je ne disais pas que j’étais dans les meilleurs au monde. Quand je ne suis pas assez bon, je le dis que je ne suis pas assez bon. »
C’est aussi de cette façon qu’il éduque sa fille Rose, afin « qu’elle soit capable d’être franche envers elle-même », poursuit celui qui est sur le point d’obtenir son baccalauréat en communication à l’Université Laval.
« Une méchante grosse claque dans la face »
La carrière internationale de Laurent Dubreuil a démarré sur les chapeaux de roue. Auréolé du titre mondial junior au 500 mètres en 2012, il a rapidement fait sa place chez les seniors. Sa sélection dans l’équipe olympique canadienne aux Jeux de Sotchi de 2014 semblait donc être une formalité, mais le patineur a raté sa qualification et a dû attendre quatre années de plus pour vivre ce grand rendez-vous. « La plus grosse déception de ma carrière d’athlète » qu’il qualifie « d’échec énorme ».
« Je n’étais pas capable de réaliser que je ne progressais pas, même si à mes yeux je progressais. Mais là, je ne me classe pas et c’était une méchante grosse claque dans la face… et tant mieux, car c’est ça que ça me prenait pour réaliser que ma carrière, ça n’allait pas bien. J’avais les yeux fermés face à mes propres problèmes et mes propres échecs. Ça m’a empêché de progresser. »
On lui pose la question : s’il avait patiné aux Jeux olympiques de Sotchi, serait-il encore un athlète de haut niveau aujourd’hui ? Sa réponse est sans équivoque.
« Je n’aurais pas eu la saison que j’ai eue l’année d’après où j’ai gagné la première médaille de ma carrière en Championnats du monde et mes cinq premières médailles en Coupe du monde. J’ai eu une année de rêve qui s’apparente à ce que je fais en ce moment. Cette année-là, je l’ai eue à 100 % au fait que je ne me suis pas classé (pour les Jeux) avant. Et ç’a revigoré ma passion. Maintenant, je sais elle est où ma passion et je sais comment l’alimenter. À cet âge-là, je l’avais perdue. »
Un élan stoppé par la pandémie
Le Lévisien a été étincelant en 2019-2020. Il a entre autres fini deuxième aux Championnats du monde sprint et remporté trois médailles aux finales de la Coupe du monde. « C’était mon meilleur patin en carrière et de loin ! »
Tout juste après, l’annulation des Coupes du monde de l’automne 2020 en raison de la pandémie est survenue comme un coup de massue. Le patineur a appris la nouvelle alors qu’il faisait une séance d’entraînement de vélo stationnaire, un entraînement qu’il n’apprécie pas particulièrement. C’est à contrecœur qu’il a terminé sa séance, rappelle-t-il.
« Ça, ç’a été tough ! Je sentais qu’on venait de m’empêcher de gagner plusieurs médailles, parce qu’à mes yeux, j’arrivais là et j’allais en gagner plein en Coupe du monde. C’est comme ça que je me sentais. […] Je suis dans les meilleures années de ma carrière, j’ai 28 ans, ça va parfaitement bien et ils annulent tout. »
Gregor Jelonek, qui le dirige depuis près de 15 ans, est devenu un ami de Dubreuil et même le parrain de sa fille. Comme dans un vieux couple qui se comprend, l’entraîneur et l’athlète n’ont pas eu à discuter longtemps pour s’entendre, encaisser le coup et analyser la situation.
« J’ai appelé Greg et je ne lui ai même pas demandé. Je lui ai dit : “ Greg, je prends une semaine off. ” Il a répondu : “ C’est ça que j’allais te dire. C’est la meilleure chose à faire. Je sais à quel point tu te sens bien et à quel point t’étais motivé. Je le sais comment tu te sens. Décompresse et reviens quand tu te sens mieux. ” »
À ce moment, Dubreuil, sa conjointe et leur fille demeuraient provisoirement chez les parents du patineur avant d’emménager dans leur nouvelle résidence. L’athlète a profité de cette pause pour regarder les matchs éliminatoires de la NBA, jouer à des jeux vidéo, se coucher aux petites heures du matin et faire la grasse matinée. Mais pas pour bien longtemps.
« J’aime ça faire ça une couple de jours, mais rapidement, je m’emmerdais. J’étais tanné et j’avais hâte de m’entraîner. Quand j’ai senti cette passion-là revenir, je suis revenu à l’entraînement en me disant qu’il y aurait peut-être des courses ou non, mais que s’il y en avait, je serais prêt. »
« Comme de la musique »
Prêt, Laurent Dubreuil l’a été lorsqu’il est entré dans la bulle de compétition d’Heerenveen (Pays-Bas). Sur le mythique anneau du Thialf, où les estrades étaient exceptionnellement vides, le Québécois est devenu champion du monde du 500 m.
Voyez la course 500 mètres de la médaille d’or de Laurent Dubreuil aux Championnats du monde
Il cite en exemple une course de l’ancien détenteur du record du monde, le Canadien Jeremy Wotherspoon, pour expliquer comment il s’est senti pendant ce moment d’une trentaine de secondes.
« Pendant sa course, le commentateur néerlandais dit dans son droit muzieken. (Le voir patiner), c’est comme de la musique. L’entendre patiner, c’est de la musique. C’est comme de l’art. C’est beau, on l’entend et il n’y a pas de bruits anormaux. Tout a l’air parfait et il n’a pas l’air de forcer, sauf qu’à ce moment-là, il pousse plus fort que n’importe quel humain avait déjà poussé sur des lames. […] C’est fluide, c’est un mouvement et chaque pas, ça s’enchaîne. Tu accélères et tu ne sens jamais que tu forces vraiment. Tu te sens très léger sur la glace. »
C’est cet état de grâce qu’il voudra reproduire le 12 février prochain. Peu importe ce qui arrivera à cette course, Laurent Dubreuil connaît déjà la suite.
« Ma vie de famille, que je sois champion du monde ou pas, ça ne change absolument rien: il faut que j’aide ma fille à se développer, il faut que j’aide mon épouse à la maison. »
Et ne comptez pas sur lui pour jouer aux prédictions.
« Je vais être la dernière personne à prédire une médaille d’or. Je suis bon, mais encore une fois, je connais mes limites. Je ne suis pas Usain Bolt en patins non plus. Ça me prend une course parfaite pour battre tous les autres gars. »
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