28 Août - 2020 | par Luc Turgeon

Plongeon

Les épaules des plongeurs mises à l’épreuve

Nouvelle

Montréal, 28 août 2020 (Sportcom) – Comme plusieurs coéquipiers après le confinement, le plongeur Philippe Gagné a eu du mal à remettre la machine en marche en juillet. C’est toutefois un mouvement qui lui semblait anodin à l’entraînement, la rotation des bras précédant le plongeon, qui lui a causé le plus d’ennuis.

« On a eu beaucoup de problèmes d’épaules en revenant à la piscine. Des mouvements assez intenses, mais qu’on ne prenait pas en considération parce que c’est un petit mouvement du plongeon. On est revenu directement à faire des cercles de bras normaux et nos épaules n’ont pas aimé ça ! » souligne-t-il.

Le tout a causé de l’irritation au niveau antérieur du tendon de la longue portion du biceps, explique le physiothérapeute de l’INS Québec affecté à l’équipe nationale de plongeon, Jean-Sébastien Rondeau. « Quand on lève les bras, il n’y a pas beaucoup d’espace sous l’acromion et il suffit d’un minimum d’inflammation pour que le tendon se fasse pincer entre la structure osseuse et l’humérus. »

La situation a découragé Gagné lors de son retour à l’INS Québec. « C’est vraiment la première semaine qui a été difficile et on a dû revenir aux mouvements de base », raconte le Montréalais.

Sans que les athlètes aient à rater une séance d’entraînement, plusieurs se sont plaints d’un inconfort aux épaules. Selon M. Rondeau, même s’ils ont tous tenté de maintenir la forme durant le confinement, une période d’adaptation était à prévoir.

« Un suivi s’est fait à distance au cours des derniers mois, mais il demeure qu’un entraînement habituellement fait dans la piscine, c’est extrêmement difficile à reproduire à la maison. On perd la sensation qu’on a dans l’eau », dit celui qui travaille à l’INS Québec depuis 2015.

Philippe Gagné l’a remarqué à son retour. « Juste de prendre mes mains pour rentrer dans l’eau, l’impact de l’eau était difficile. Il y a plein d’affaires qu’on faisait tous les jours qui devenaient difficiles. Ça faisait mal de les faire », confie-t-il.

Malgré tout, après un premier plongeon, l’athlète de 22 ans se sentait dans son élément, comme s’il y était une semaine plus tôt.

Comme un lanceur

Bien que le retour n’ait pas été précipité par l’équipe, Jean-Sébastien Rondeau estime que la préparation physique aurait dû être plus équilibrée pour prévenir ces problèmes aux épaules. « On travaille beaucoup le bas du corps et cette fois, je pense qu’on a sous-estimé les impacts sur les épaules et qu’on n’a pas fait assez de pliométrie pour les membres supérieurs », analyse-t-il.

Ce dernier compare les cercles de bras des plongeurs à un lancer fait par un joueur de baseball. Cependant, les bras des plongeurs étant souvent bien droits, ce sont les épaules qui gèrent toute cette force créée par plusieurs rotations consécutives. « On parle d’une grande accélération vers l’arrière, suivie d’une brusque décélération et d’une autre accélération. C’est ce geste d’une très grande vélocité qui a causé le plus de problèmes », précise M. Rondeau.

Maintenant, les plongeurs doivent effectuer différents échauffements pour éviter que ça se reproduise et Jean-Sébastien Rondeau veille à ce que tout soit fait progressivement, aux côtés d’autres membres du personnel. Régulièrement sur le bord de la piscine, il communique avec les entraîneurs et effectue un suivi quotidien avec chaque athlète.

Début de saison canon

Le 29 février dernier, au Parc olympique de Montréal, Philippe Gagné est devenu le premier plongeur canadien à décrocher un titre individuel en Séries mondiales depuis 2010. Alexandre Despatie était le dernier porte-couleur de l’unifolié à monter sur la plus haute marche du podium dans ce circuit.

« La saison a bien commencé et j’avais un bon momentum. Je me suis longtemps demandé si l’année prochaine, je serais capable de replonger comme ça et de retrouver le même état d’esprit », admet celui qui s’est donné des objectifs en salle de musculation pour rester motivé.

Gagné ne s’attendait pas à voir la situation dégénérer de la sorte au début du mois de mars. Le report des Jeux, le confinement et l’annulation de plusieurs compétitions ont pesé lourd sur le moral du Québécois. D’autant plus qu’il comptait s’éloigner de sa discipline pour se concentrer davantage sur ses études en génie logiciel à la Polytechnique Montréal après les JO, projet qu’il a décidé de repousser d’une année.

« Ç’a été difficile que tout soit coupé sec comme ça. Maintenant, je veux refaire le même processus que l’an dernier et revenir en force. »

Cela implique de s’entraîner par pure passion du sport et de ne plus voir le plongeon comme un emploi. Une stratégie qui, selon Gagné, a fait ses preuves au cours du dernier cycle olympique. Il espère reprendre là où il a laissé en mars en prévision des Jeux de Tokyo. À Rio, en 2016, Philippe Gagné s’était classé 11e à l’épreuve individuelle du 3 m.

« On y va une journée à la fois, mais plusieurs avis diffèrent quant à la reprise des activités. Personne ne sait avec certitude ce qui va se passer, alors on s’entraîne pour arriver prêt lorsque les compétitions recommenceront », conclut-il.

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