
Para-athlétisme
Para-athlétisme
Photo: Marcus Hartmann / Gate 3
Montréal, 12 mai 2025 (Sportcom) – Est-ce que le Québécois Anthony Bouchard s’est fait ravir une médaille de bronze aux Jeux paralympiques de Paris ? Une controverse entourant le handicap du double champion paralympique, le Belge Maxime Carabin, vient remettre en doute ses résultats, mais surtout, sa place dans la catégorie T52.
Un reportage diffusé en février sur la chaîne belge RTBF dernier remet en question les capacités physiques de l’athlète en fauteuil roulant sacré champion paralympique au 100 m et au 400 m. Des membres de sa délégation et des adversaires soutenus par leur comité paralympique contestent maintenant sa place chez les T52, photos et vidéos à l’appui.
Les doutes étaient présents depuis quelque temps comme l’avance Anthony Bouchard, qui s’est frotté à Carabin en septembre dernier au Stade de France.
« Il y a anguille sous roche et j’ai hâte de voir la tournure des événements », a mentionné Bouchard avec scepticisme à Sportcom, lui qui a terminé au pied du podium du 100 m T52 à Paris, à 11 centièmes de seconde d’une médaille paralympique.
Les soupçons envers l’athlète s’expliquent par sa posture et sa capacité à effectuer certains mouvements du tronc, des pieds et des doigts, en plus du fait qu’il ait conservé sa masse musculaire aux jambes après sa paralysie. D’autres éléments font aussi sourciller des professionnels de la santé dans le reportage qui a attiré l’attention d’Anthony Bouchard.
Maxime Carabin est tout simplement intouchable depuis son arrivée en 2022. Il n’a jamais perdu une course internationale et abaisse constamment ses propres records du monde. Cinq fois champion du monde en deux participations aux mondiaux, il a aisément remporté deux titres paralympiques dans la capitale française.
Ce qui en a surpris plusieurs, c’est que ses résultats de classification ne lui permettaient pas de courser à l’échelle nationale, en Belgique. Il a ensuite reçu l’autorisation du Comité international paralympique après avoir suivi une deuxième évaluation. Selon le principal concerné, l’amyotrophie monomélique dont il est atteint aurait compliqué tout le processus.
Le Québécois précise qu’il ne veut pas jeter directement la pierre vers son adversaire.
« S’il y a quelque chose qui n’est pas correct dans tout ça, il faut d’abord pointer du doigt le système de classification », a commenté Bouchard. En plus de sa quatrième place au 100 m, l’athlète en fauteuil roulant originaire d’Alma s’était classé sixième au 400 m des Jeux, épreuve également remportée par Carabin.
« Peu importe ce qu’il a fait, que ce soit bien ou mal, il a réussi à passer le système de classification. Ils sont super sévères avec le dopage, mais contourner la classification, ça reste la façon la plus simple et évidente de tricher. »
Les classifications sont souvent à l’origine de controverses dans les sports paralympiques et les plus récents Jeux n’ont pas fait exception.
Un premier exemple provient du paracyclisme sur route, dans la catégorie du Québécois Charles Moreau. Le Français Mathieu Bosredon en était à sa première saison dans la catégorie H3 et, sans surprise, il a facilement remporté deux médailles d’or. Un mouvement de protestation était survenu avant les Jeux paralympiques, lors d’une Coupe du monde, où ses concurrents s’étaient arrêtés quelques instants durant une course afin que Bosredon soit muté dans une catégorie qui correspond davantage à ses limitations physiques.
En paranatation, l’Américaine Christie Raleigh-Crossley avait elle aussi vu sa classification être remise en question à Paris. Médaillée d’argent au 50 m libre S10, tout juste devant Aurélie Rivard, Raleigh-Crossley a également reçu des commentaires désobligeants à ce sujet, dont certains émis par des membres de sa propre délégation.
Solutions proposées
Difficile de cibler quels seraient les meilleurs moyens afin d’améliorer le système de classification. D’abord pour le rendre le plus juste possible, mais aussi pour qu’il soit difficile à contourner.
En plus d’un examen médical, la technique des athlètes est évaluée sur la piste, puisqu’elle varie selon les capacités des athlètes. « Un T53 ne s’y prendra pas de la même façon qu’un T52 », comme l’a résumé Anthony Bouchard.
Responsable de la classification nationale chez Athlétisme Canada, Patricia Roney souligne que chaque test est effectué pour une raison précise, dans le but d’obtenir une donnée particulière.
« Des informations spécifiques ressortent des tests et s’imbriquent. Avec les documents médicaux, la classification se doit d’être précise pour minimiser les erreurs et être juste envers les athlètes », a affirmé Mme Roney, ajoutant que les systèmes de classification sont souvent mis à jour.
« Certains tests ne laissent aucun doute et se mesurent, mais il peut y avoir des zones grises. Il y faut y aller le plus précisément possible et les classificateurs peuvent demander plus d’informations. »
Anthony Bouchard est d’avis qu’il faudrait compliquer la tâche aux athlètes qui pourraient se faufiler entre les mailles du filet.
« Les classificateurs vont suivre le dossier médical que tu leur donnes. Ils ne peuvent pas vraiment commencer à dire que ce n’est pas vrai ce que tu as. Selon le dossier, il y a une série de tests, mais ce sont des tests simples où c’est possible de mentir », a-t-il partagé.
« Ce n’est pas que ce n’est pas sérieux, mais ce n’est pas à jour. (Ce qui arrive), ça va peut-être faire bouger les choses », a conclu Bouchard, dont les yeux sont déjà rivés sur le podium des Jeux paralympiques de Los Angeles, en 2028, peu importe qui seront ses adversaires.
Le Comité international paralympique a annoncé que Maxime Carabin devra repasser par le système de classification pour savoir s’il peut rester chez les T52, s’il doit changer de catégorie ou s’il n’est pas éligible au para-athlétisme. D’ici là, il pourra continuer de courser et devrait être au Grand Prix de Nottwil, en Suisse, contre Anthony Bouchard.