12 Juin - 2023 | par Mathieu Laberge

Break – Breaking for gold Montréal

Le Break : mode d’emploi et présentation de cette nouvelle discipline olympique

Nouvelle

Christian Martin

Montréal, 12 juin 2023 (Sportcom) – Les 3 et 4 juin derniers au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, des athlètes de 32 pays se sont affrontés dans le cadre du Breaking for Gold. Breaking comme dans Breakdancing, l’ancienne appellation de la discipline qui sera au programme des Jeux olympiques de Paris dans un peu plus d’un an.

Le Break, appellation officielle selon l’Office québécois de la langue française, c’est bien plus que les danses de robot ou les acrobates qui tournaient en équilibre sur leur tête que l’on a commencé à voir dans les médias de masse au début des années 1980. C’est surtout de la danse avec des touches qui rappellent la gymnastique artistique, la boxe et le patinage artistique. Le tout englobé d’une culture qui lui est propre.

Des codes propres à une culture

Ce qui frappe à première vue chez les adeptes du Break, c’est la marge de manœuvre artistique dont ils disposent. Contrairement au patinage artistique où la musique est connue à l’avance et les chorégraphies sont réglées au millimètre, le Break offre une grande liberté, ce qui laisse encore plus de place à la créativité des breakeurs (B-Boys) et breakeuses (B-Girls), puisque c’est ainsi que l’on nomme les participants.

Sur la scène, deux DJ enchaînent en continu les chansons qui touchent au rap, au funk ou au soul. Pas de chansons ni de rythmes imposés, sauf que l’échantillon de la batterie de Funky Drummer de James Brown finit toujours par se tailler une place dans la trame sonore comme il est un des fondements de la culture hip-hop.

Un parallèle est aussi à faire avec la boxe : l’arène est remplacée par un plancher de danse. Et dans chaque coin, l’athlète peut compter sur son entraîneur ou ses amis pour l’encourager. Contrairement à la boxe, les clans dans les autres coins prennent plaisir à regarder leur adversaire s’exécuter pendant environ une minute, jusqu’à ce qu’ils soient trop fatigués pour continuer.

Pas pour rien que certains affrontements portent le nom de Battle.

Le lien avec la gymnastique est lui plus évident. Certaines manœuvres sont les mêmes que celles qui peuvent être exécutées sur un cheval d’arçons ou au sol par exemple.

« Le Break, c’est une charge d’adrénaline sans arrêt à l’état pur. Plus tu vas rapidement, plus tu es précis et plus tu parais clean. […] L’art et la culture rencontrent le sport et c’est ce qui fait le Break », explique Eric « Zig » Martel, organisateur de la compétition montréalaise.

Raz-de-marée à prévoir

L’admission de la discipline aux Jeux olympiques a précipité bien des choses, surtout du côté organisationnel, car les compétions doivent désormais entrer dans le moule du sport international fédéré afin de répondre aux nombreuses normes du Comité international olympique (CIO).

Pour séduire le jeune public et aussi ne pas passer à côté d’un marché prisé des annonceurs, le CIO a intensifié l’ajout de disciplines à son programme qui étaient jusqu’alors organisées par le fabricant des boissons énergisantes Red Bull au cours de la dernière décennie.

La transition vers le sport fédéré s’est bien déroulée au Québec constate Martel.

« Danse Sport Québec nous a beaucoup aidés. Elle nous a pris sous son aile. Elle était déjà là depuis 50 ans et ils nous aident beaucoup dans ce trip-là, »

Selon lui, qu’est-ce que ça va changer la présence du Break aux Jeux olympiques ?

« C’est une question qui est dure à répondre, car déjà, juste en voyant ce qui va arriver, c’est un raz-de-marée ! C’est tellement rapide tout ce qui se passe que je pense qu’il y a beaucoup de monde qui vont faire ça, qui vont danser, qui vont faire évoluer la danse et le sport pour devenir les prochains Phil “Wizard” Kim de ce monde », poursuit l’organisateur en faisant référence au Vancouvérois, premier au classement mondial des qualifications olympiques.

Kim était présent à Montréal, sans toutefois être inscrit à la compétition. Celui qui a délaissé des études en psychologie pour vivre de sa passion voit déjà une différence depuis que son sport a reçu l’approbation des cinq anneaux.

« Ce n’est pas un choc de voir le Break arriver aux Jeux, mais bien une agréable surprise. L’inclusion aux Jeux olympiques, c’est quelque chose de gros pour notre communauté et notre culture. Il y a beaucoup plus d’attention médiatique, plus d’occasions d’affaires pour en vivre. Ç’a déjà beaucoup changé et je crois que ça va continuer », soutient le B-Boy âgé de 26 ans qui devrait logiquement représenter le Canada à la Place de la Concorde en juillet 2024.

Le mot « culture » revient constamment dans les entrevues et ce n’est pas anodin. Chaque fois qu’une discipline hors marge et prisée d’un jeune public devient un sport olympique, un choc inévitable survient entre les puristes et ceux et celles qui sautent dans le train de leur sport qui devient fédéré et davantage encadré.

On l’a vu entre autres en surf des neiges, en ski acrobatique et en skateboard. Est-ce le même sort qui attend le Break ?

« La beauté que nous avons au Canada, c’est que tous les anciens ont travaillé ensemble pour créer une unité, constate Éric Martel. Qu’est-ce qu’on va faire avec ça ? On le sait que ça va être là (le choc) de toute façon, alors ça doit être nous qui prenions le temps de bâtir ça. C’est comme une balance : ce qu’on voit sur le stage, c’est hyper gros et ce qu’on voit derrière (dans les coulisses), c’est ça notre danse. C’est le côté underground. Les événements de la culture doivent être présents pour balancer ce qu’il y aura aux Olympiques. Ça va être là de toute façon et c’est à nous de bien préparer la nouvelle génération. »

Un objectif olympique aussi pour les juges

Le juge en chef au Breaking for Gold, était Luca Patuelli. Le Montréalais surnommé Lazylegz, car il danse avec des béquilles canadiennes en raison de son arthrogrypose, qui se caractérise par la raideur de ses articulations. On a notamment pu le voir en action aux cérémonies d’ouverture des Jeux paralympiques de Vancouver et dans différents concours ou émissions de télévision grand public.

Comme les athlètes, il veut être à Paris, mais à titre de juge. Étant donné qu’il est passé de l’autre côté de la clôture, il ne peut plus participer à des compétitions à titre de danseur. Il ajoute que la présence de para-athlètes en Break pourrait être possible.

« La beauté du hip-hop, c’est que c’est vraiment inclusif, alors je n’ai jamais fait une compétition contre des personnes handicapées. S’il y a des danseurs de bon niveau, handicapés ou pas, ils peuvent se qualifier pour les Olympiques. Il n’y a pas de Break aux Jeux paralympiques. […] Même moi, comme personne avec un handicap, je suis un juge international. C’est ton niveau, ta créativité et la façon que tu vas exécuter tes mouvements. Si tu as ça, tu es capable d’être un danseur de haut niveau. »

À Paris, 16 hommes et 16 femmes, avec un maximum de deux athlètes par nation, prendront part aux compétitions. Une douzaine de juges seront retenus pour noter les concours.

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