16 Jan - 2023 | par Mathieu Laberge

Biathlon

Jules Burnotte : retraité en toute honnêteté

Nouvelle

Photo: Nordic Focus

Montréal, 16 janvier 2023 (Sportcom) – Aller s’entraîner et avoir l’impression d’être un ouvrier qui va pointer sa carte à l’usine au début de son quart de travail. C’est ce sentiment qui a habité le biathlète Jules Burnotte au cours des derniers mois. Après un début de saison où les résultats ont été en deçà de ses attentes, le Sherbrookois a officiellement annoncé lundi matin qu’il tirait un trait sur sa carrière d’athlète de haut niveau.

Cette prémisse peut sembler triste au premier regard, mais Jules Burnotte est parfaitement à l’aise de son choix. D’abord parce qu’il y voit une marque d’honnêteté envers lui-même, mais aussi à l’endroit de tous ceux et celles qui l’ont appuyé au cours des dernières années.

« C’est moi qui ai décidé de ne pas terminer la saison. Ça sonne un peu spécial, car on n’est pas habitués de voir ça et même moi je ne pensais pas finir de cette façon », a concédé le nouveau retraité à Sportcom, ajoutant que les entraîneurs de l’équipe nationale lui avaient fait une place pour les prochaines Coupes du monde et les mondiaux du mois prochain.

Quand le cœur n’y est plus

À l’été 2022, Burnotte a pu s’entraîner alors qu’il était en pleine santé pour une première fois depuis  longtemps. Toutefois, en entrevue en septembre, il mentionnait déjà que les longs séjours en Europe commençaient à lui peser dans sa vie personnelle.

« Je faisais le travail quand même, mais je me disais : “quand je vais arriver en compétition, ça va être bien. Je suis en santé et normalement, ça devrait être les meilleurs résultats possibles.” Finalement, à ma première course, j’ai eu un résultat qui n’était pas à la hauteur de mes attentes. C’était la même chose à la deuxième semaine. À la troisième semaine, j’en avais parlé aux coachs : “là, je vais donner tout ce que je peux, mais ça se pourrait que ça s’arrête là.” J’ai fait une super course à la dernière journée, mais ça n’a pas été suffisant pour faire un top-60. »

Déçu de constater que ces résultats ne reflétaient pas ce qu’il était en mesure de faire, Burnotte est rentré à la maison afin de réfléchir à son avenir sportif. Son retour à la pratique des activités de plein air, sans chronomètre, pourcentages des fréquences cardiaques ou de cibles atteintes, a nourri sa réflexion.

« C’est une décision personnelle de me dire que ce n’est plus ça que j’ai le goût de faire. J’ai essayé, je me suis entraîné pendant l’été et j’ai déjà connu de meilleurs résultats. J’ai maintenant de la difficulté à mettre l’intensité qu’il faut à l’entraînement et j’ai aujourd’hui le goût de la mettre ailleurs. »

Burnotte explique que cette intensité devait présente dans toutes les sphères de son sport, non seulement pour obtenir les meilleurs résultats, mais aussi par respect pour le travail des entraîneurs et techniciens de l’équipe nationale, ce qui est primordial à ses yeux.

« Je ne voulais pas commencer à faire semblant », poursuit-il sans s’autoflageller. « On a des techniciens qui passent entre six et huit heures à tester des skis dans le froid ou dans la pluie. Ils skient beaucoup plus que nous juste pour que nous ayons une paire qui va glisser mieux que les autres. Moi, j’arrive et je ne suis pas capable de mettre tout mettre en place. Je ne voulais pas continuer à ne pas être le meilleur de moi-même dans ce monde-là. »

Une carrière courte, mais intense

Jules Burnotte a connu ses meilleurs moments aux Jeux olympiques de Pékin, l’hiver dernier. Pas seulement parce qu’il est devenu Olympien, mais surtout parce qu’il a brillé en décrochant trois tops-30 individuels, dont une 18e place au départ groupé, ainsi qu’une sixième au relais masculin.

Trois semaines plus tard, il enregistrait son meilleur résultat en Coupe du monde, une 21e place au sprint d’Otepaeae, en Estonie.

Son talent lui a aussi permis de participer aux Championnats du monde juniors 2015 de cross-country des moins de 20 ans en athlétisme.

Après des premières années difficiles avec sa fédération nationale, le Québécois a pu la convaincre qu’il serait mieux pour lui de s’entraîner avec Louis Bouchard et les fondeurs du Centre national d’entraînement Pierre-Harvey durant la saison morte.

« Ça n’a pas été un chemin facile, mais ça en est devenu un très agréable. […] Nous avons fait ce bout de chemin ensemble et il sera sûrement bénéfique pour d’autres athlètes dans le futur », avance celui qui était reconnu pour offrir ses meilleures prestations aux compétitions les plus importantes.

En contrepartie, il regrette d’avoir manqué de constance dans ses résultats.

Ses dernières années ont été marquées par une commotion cérébrale, une mononucléose et la Covid-19. Tous des épisodes qui ont laissé des traces.

« Je suis quand même très content de m’être poussé dans quelque chose qui ne m’était pas prédestiné. Mes parents m’ont beaucoup encouragé, mais ils ne m’ont jamais poussé à aller là (en compétition). Je suis même surpris d’avoir fait du sport de haut niveau pendant quatre ou cinq ans. Ni mes parents, amis ou moi auraient pensé que ce serait mon genre de truc. Les gens qui me croisent me disent que je n’ai pas l’air d’un athlète et je ne me sens pas comme un non plus ! Je suis super content de l’avoir fait et de toute l’énergie que j’ai mise là-dedans. Je n’aurais pas pu en mettre plus. »

La passion de l’éducation

Là où Jules Burnotte voudra désormais être le meilleur de lui-même, c’est à l’école. Le 9 janvier, il est retourné à plein temps sur les bancs d’école au baccalauréat en éducation physique et à la santé à l’Université de Sherbrooke.

Lorsqu’il sera enseignant dans les gymnases, son parcours d’athlète sera bien rangé au vestiaire.

« Ça fait drôle à dire pour quelqu’un dont ç’a été le métier pendant toutes ces années, mais ce n’est pas en étant compétitif qu’on va accrocher tout le monde à faire du sport. […] Le plein air permet de se développer dans les activités physiques et la performance n’est pas importante pour bien du monde. Ce que j’ai le goût de partager, c’est le plaisir d’être actif et de se déplacer dans la nature et de faire du plein air de proximité. C’est vers ça que je vais me tourner dans le développement personnel. »

Mais attention : celui qui restera compétitif « tout le temps » pourrait bien revêtir à nouveau les couleurs de l’équipe de cross-country du Vert & Or l’automne prochain.

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